Dissolution électro-chimique induite de fragments de limes endodontiques en nickel- titane et leur suppression dans des canaux radiculaires simulés.
Objectif
Améliorer le processus de dissolution de limes NiTi rotatives en visant l’élimination des fragments et la reprise de la trajectoire initiale du canal pendant une période de temps acceptable cliniquement .
Méthodologie
Des courbes de polarisation anodique d’oxydo-réduction ont été obtenues pour déterminer les conditions nécessaires à la dissolution de limes endodontiques. La polarisation anodique de limes K3 a été effectuée, et l’analyse de la variance (p <0,05 ) a été utilisée pour comparer les différents temps de test par rapport à la perte de poids, perte de longueur et la charge électrique générée dans chaque solution . La polarisation de fragments dans les canaux radiculaires simulés a été entreprise pour évaluer le processus de dissolution. Après les essais, une lime K 010 a été utilisée pour vérifier la possibilité de contourner le fragment. La charge électrique totale de chaque test a été obtenue à partir de la zone graphique correspondante.
Une analyse radiographique des canaux simulés a été utilisée avant et après les essais pour vérifier la dissolution du fragment.
Résultats
Les valeurs de perte de poids, les valeurs de perte de longueur, et les valeurs totales de la charge électrique dans chaque période de temps étaient significativement plus élevées (p < 0,05) dans les essais utilisant la solution choisie par rapport à la solution précédemment proposée. Une consommation progressive de la pointe de lime K3 a été observée jusqu’au 30 minutes testées [immersion dans 400 ml de solution test].
La polarisation anodique de fragments de limes dans les canaux radiculaires simulés pendant 60 minutes a donné lieu à la dissolution partielle et a permis la reprise de la trajectoire initiale à l’aide d’une lime K010.
Conclusions
L’augmentation de la concentration de fluorure a entraîné une plus grande dissolution active des limes NiTi . La dissolution de lime fracturée dans les canaux radiculaires simulés a permis la reprise de la trajectoire initiale, pendant une période de temps acceptable cliniquement.
L’intérêt de cet article de recherche repose sur la volonté de trouver une solution clinique à une complication opératoire frustante : la fracture instrumentale.
La gestion des intruments fracturés repose sur 2 possibilités techniques : le by-‐pass (contournement) ou son éviction. Ces techniques restent très praticien et plateau technique-dépendant ; l’utilisation d’un microscope opératoire et d’ultra-‐sons spécifiques sont le pré-‐requis pour améliorer la prédictibilité du retrait des instruments fracturés.
Ainsi la possibilité de dissoudre l’instrument fracturé à l’aide d’une solution spécifique semble très séduisante. Les risques iatrogènes sont diminués par rapport à des ultra-sons agressifs et le plateau technique est grandement simplifié. Cette voie de recherche déjà investiguée (Ormiga et al. 2011) présentait une limite principale : le temps de dissolution de la lime était incompatible cliniquement (plus de 6 heures !).
Les auteurs de cette étude ont donc pour objectif d’améliorer cette dissolution en accentuant l’efficacité de la solution corrosive. L’étude se divise en deux grandes parties :
- 1ère partie : trouver la concentration, le pH et le potentiel d’oxydo-‐réduction le plus intéressant pour améliorer l’efficacité de la solution corrosive
- 2ème partie : utiliser la solution corrosive avec les paramètres trouvés de la 1ère partie sur un dispositif se rapprochant de la clinique : fracture instrumentale de lime rotative au sein de canaux simulés en résine.
Les résultats de la première partie montrent qu’une solution de fluorure de sodium (12g/L) à un ph de 5 et selon un potentiel d’oxydo-‐reduction de +0,6 V présente le meilleur compromis temps-‐dissolution. Les résultats de la seconde partie mettent en évidence la possibilité de by-‐passer l’instrument fracturé à l’aide d’une lime K010 au bout de 60 minutes selon les critères définis lors de la première partie.
Ces données obtenues sont particulièrement intéressantes pour une extrapolation clinique. La solution de fluorure de sodium semble permettre une dissolution d’instrument rotatif en nickel-titane (K3, conicité 6% et diam.20/100ème). Cependant plusieurs limites doivent êtres soulevées :
- la corrosivité de la solution envers les tissus dentaires n’est pas testée dans cette étude. Les auteurs confirment son innocuité en se basant sur une étude où la solution était testée pour une protection contre des reflux gastriques donc extra-‐ radiculaire. Une vérification sur la dentine intra-‐radiculaire semble nécessaire avant toute mise en place clinique.
- La mise en place d’un courant est nécessaire pour la réaction d’oxydo-‐réduction. Là encore l’innocuité sur les tissus parodontaux est à vérifier même si les auteurs estiment que les tissus dentaires ne permettent pas la conduction du courant
- La réaction d’oxydo-‐réduction nécessite un volume de solution important qui sera difficile à rétablir au sein d’une chambre pulpaire. L’adjonction d’un « réservoir » plus volumineux sera certainement à définir.
- Le temps de dissolution est plus compatible cliniquement que l’étude d’Ormiga.
Cependant 60 minutes reste un temps long ne permettant pas une totale dissolution du fragment et nécessitant une mise en place de la technique du by-pass. Remarquons que la technique du by-pass doit toujours être tentée dans un premier temps et que sa réussite rendrait caduque la dissolution partielle de 60 minutes
Cette étude présente une voie de recherche intéressante pour faciliter la gestion des instruments fracturés. Le protocole de recherche n’est cependant pas encore extrapolable cliniquement. A ce jour, il ne peut que s’appliquer à la dissolution des limes en nickel-‐titane laissant de côtés les limes en acier et lentulos et devra aussi se confronter aux complexités de l’anatomie endodontique : fracture sous la courbure, au niveau du tiers apical, au sein d’irrégularités canalaires (isthmes, bifurcations)…
Electrochemical induced dissolution of fragments of nickel-titanium endodontic files and their removal from simulated root canals.
Aboud LR, Ormiga F, Gomes JA.
Int Endod J. 2014 Feb; 47 (2):155-‐62.
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